The Tatami Galaxy
Définir the Tatami Galaxy comme étant "un animé" m'est difficile. J'ai plutôt envie parler d'une expérience visuelle et sensitive. Lorsque l'on veut parler de cet animé, on a à la fois envie de parler des personnages, des formidables techniques narratives utilisées, du meli melo de situations qui tiens à la fois du retour vers le futur et de l'effet papillon, mais aussi des effets graphiques, et moi de l'envie de manger du castella qui me tiraille après chaque épisode et finalement, on ne sait plus trop quoi dire. Mais je vais essayer tout de même.
Le premier épisode nous narre l'histoire d'un jeune homme, envahissant narrateur qui parle à la fois de manière dense et rapide, et qui entre à l'université. Déterminé à y mener "une vie en rose", il choisit d'entrer au club de tennis, ou il pourra certainement faire les plus belles rencontres. Mais après un râteau et le triste constat qu'il ne parviendrait pas à se lier à quelqu'un dans ce club, il fait la connaissance d'Ozu, un personnage très particulier qui semble tout droit sortit des enfers, et avec qui il va faire les 400 coups pour briser les couples.
L'histoire commence à la fin de ces deux années ou un homme se présentant comme étant un dieu de l'amour lui propose de le lier à Akachi, une jeune fille qui n'a jamais été très loin de lui et qu'il estime. L'histoire suit son cours, et à la fin de l'épisode, pour la première fois, il fait ce constat : Si seulement les choses avaient été différemment... Le temps se rembobine, le générique de fin se lance.
Par la suite, chaque épisode va donc présenter une vie alternative du héros, s'il avait choisi tel ou tel club. Mais bien vite, le principe va se distordre ; Les épisodes, parties pour suivre chacun le même schema narratif, finissent par se modifier de manière plus ou moins flagrante. Dans certaines scènes similaires, les personnages, reprenant les mêmes dialogues qu'à l'épisode précédent s'interrompent, avant de se convaincre d'une simple sensation de "déjà vu". Un personnage récurent, la voyante, s'amuse d'elle même à distordre petit à petit son propre personnage.
Ce qui se présente au début comme un "simple" schéma de l'effet papillon se révèle en effet bien plus complexe, car chaque événement déclenché par le héros dans une de ces réalités alternatives existe tout de même dans les autres réalités, donnant au spectateur un terrible meli melo à reconstituer en cherchant à comprendre comment cela peut-il être possible. Cela veut il dire que les événements provoqués par le héros l'auraient de toutes manière été si ça n'avait pas été lui, ou autre chose ? Les différentes réalités interagissent les unes avec les autres, et des éléments mineurs incompréhensibles deviennent compréhensibles par la suite lorsque l'on connait le déroulement des autres réalités alternatives.
Chose amusante (?) le héros finit toujours par regretter son choix passé et se dire que sa vie aurait été meilleure s'il avait fait un autre choix. L'herbe est toujours plus verte ailleurs ?
Nous retrouvons toujours la même brochette de personnages : Ozu "Qui fait du malheur d'autrui son apéritif", Akashi, une jeune fille distante qui se retrouve toujours sur le chemin du héros, le "dieu" du premier épisode qui, dans les épisodes suivants, est toujours un multi redoublant, et avec eux divers personnages qui ont peu ou prou les mêmes rôles dans chaque histoire, mais avec des variations selon la position et donc le point de vue du héros. Au début, on a l'impression que tous ces univers sont différents, mais en vérité, c'est le héros et lui seul qui est différent. Les autres se contentent de cumuler les rôles, affichant une facette différente de leur personnalité selon l'épisode. Une pensée pour le chef du club de cinéma que je trouve touchant malgré ses vices.
Ozu est LE personnage récurent entre tous, car il firte presque avec le rôle d'intrigue principale. Qu'est il réellement ? Pourquoi a t'il ce visage de démon, ces dents pointues ? Cette petite queue de démon que l'on voit s'agiter derrière lui dès qu'il prépare un mauvais coup est il une allégorie ou une réalité ? On n'arrive rien à savoir de lui, et les dialogues répétitifs et mystérieux que le héros échange avec lui ne font qu'augmenter l’intérêt envers ce personnage qui ne semble dépendre de rien. Le dernier épisode ouvre le champ à de nombreuses théorie, les miennes sont écrites dans mon article analytique sur cette série.
Dans chaque histoire, la présence d'Akachi est vive et rafraichissante. Incisive également, car elle n'hésite pas à rabrouer quiconque s'approche bêtement d'elle. En tant que spectateur, on est vite frustré de voir que sa route soit liée de manière si flagrante à celle du héros et que celui ci ne le réalise pas, tout en admettant qu'à sa place, on ne le verrait pas forcement. Il lui fait toujours une promesse, qu'il ne tiens pas.
Le visuel est une part importante de l'ambiance de cet animé. Les graphismes sont extrêmement épurés et stylisés, donnant à chaque personne une silhouette unique. Les gestes et les traits sont souples, nerveux, déformés, à la limite du gag. Les tests graphiques comme animer le personnage dans un univers réel et filmé sont courants. Chose presque "classique" désormais, les textures incrustées dans les arbres, dans les ombres, qui donnent une matière particulière. Je suis très mauvaise pour parler du son. Je dirais simplement que tous les doubleurs m'ont charmé, chacun pour une raison différente, et que les musiques sont toutes très agréables, mélodiques, et restent en tête.
L'un des points communs, à chaque histoire, est la droiture sans faille du héros qui, lorsqu'il se donne un objectif, s'y tiens avec un acharnement remarquable, quand bien même les conséquences en seraient catastrophiques. Il a toujours également ce caractère presque pur, ce caractère qui lui fait dire "Je n'étais pas amoureux, et chercher une fille à cause d'une solitude momentanée n'était pas dans mes principes. Je méprisais ces étudiants qui cherchaient l'amour par solitude". Une telle droiture d'âme ne peut qu'être admirée, mais à cause de ce principe, il se condamne à être seul.
La construction de cet animé tiens du génie. Cela pourrait être brouillon, sans queue ni tête, et pourtant, non seulement tout se recroise avec perfection, mais en plus, l'animé possède ce genre de double lecture formidable qui permet de revoir la série juste après l'avoir fini pour guetter les indices qui avaient été parsemés jusque lors, voir jetés à notre figure sans que l'on percute ce qu'ils étaient réellement. Le 2eme épisode m'a fait pousser de hauts cris ravis à son 2eme visionnage, le 3eme m'a fait sourire en réalisant une surprenante confrontation, et tout était alors extrêmement limpide malgré la complexité de l'histoire. Les différents niveaux de réalités se mélangent de manière vraiment intelligente, et j'admire ceux qui ont été capable d'un tel scenario et d'une telle mise en scène ou rien n'est laissé au hasard.
Avant d'être un animé de 11 + 1 épisodes (l'histoire se concluant au 11, le 12 étant une sorte de bonus), cette histoire est un roman, Yojohan Shinwa Taikei écrit par Tomihiko Morimi. Et apparemment, ce n'est qu'une partie du roman qui a été adaptée. Je brule d'envie de savoir ce que contient ce livre, mais hélas il n'existe même pas de version anglaise (A laquelle je ne me frotterais pas je l'avoue, l'animé était suffisamment difficile à suivre en français).
Les deux derniers épisodes tranchent avec le reste de la série, et sont un régal sans fin. Finalement tout s'emboite, tout s'explique, alors que l'instant d'avant, on errait dans un univers incroyable et quasiment incompréhensible. Beaucoup de phrases choc qui font réfléchir sont énoncées dans l'avant dernier épisode, et on serait tenté de le présenter à quelqu'un tout seul, mais il n'aurait pas le même poids sans avoir derrière lui la vision des vie potentielles du héros. Quand à ce qu'il s'y passe réellement, je laisse le plaisir de la découverte aux potentielles visionneurs.
Au final, quel est le message de cet animé ? Je crois que chacun en tire son interprétation, et la masse importante d’éléments symboliques récurrents - par exemple, ces fichus papillons de nuit dont je ne suis pas sure ce dont ils sont le symbole - n'aident pas à savoir exactement ce qu'il en est. Une des conclusions possibles de l'histoire serait que si le héros n'avait pas choisi une voix, le rôle qu'il y joue aurait été tenu par un autre, car nul n'est irremplaçable. Mais cela signifierait aussi qu'il n'y a ni bon ni mauvais choix et que dans chaque vie possible dans laquelle il aurait pris place, il serait toujours "lui même" de toutes manières. Mais loin d'être fataliste, cette conclusion signifierait que, en restant soit même, on peut toujours saisir les chances qui s'offrent à nous et qui sont devant non. Inutile de penser au "et si " car même si l'on avait fait des choix différents par le passé, on en arriverait au même point.
The tatami Galaxy est un excellent animé, tant sur le visuel que sur l'histoire. Difficile d'accès oui, et qui nécessite aussi une bonne concentration voir un double visionnage, mais c'est une expérience à prendre, le genre d'animé que l'on range immédiatement dans son panthéon des œuvres de talent.
L'ending de l'animé dont je suis tombée amoureuse, pour son visuel hypnotisant et le thème du "plan" qui m'a toujours beaucoup parlé, et aussi pour cette petite voix qui oscille entre enfance et adulte et qui me reste toujours longtemps dans la tête. A sa manière, cette vidéo nous présente une version visuelle de " l'univers des possibles", chaque porte s'ouvrant donnant accès à plusieurs possibilités, qui peuvent aussi se recroiser.
Liens :
- KZplay ou vous pouvez visionner cette série gratuitement d'ici la fin du dimanche 23 octobre (Comment vous croyez que je l'ai mattée ? )