Kamichu - Animé
C'est une série faisant initialement 12 épisodes, et 4 épisodes supplémentaires furent ajoutés pour la version DVD, intercalés entre les épisodes existants : les épisodes 8, 11, 13 et 16.
Elle narre les aventures de Yurie, collégienne devenue "déesse" - dans le sens de "Kami - et qui évolue désormais dans un monde peuplé d'esprits.
Un peu de théorie :
Au premier abord, c'est l'apparente omniprésences des yokais qui m'a attiré dans Kamichu. Mais Kami et yokai, ce n'est pas vraiment la même chose. C'est la qu'il me semble intéressant de se pencher sur le mélange des religions et des cultes qui règne au japon. Il est courant de dire qu'un "Japonais nait Shinto, vit Confucianiste ou Zen et meurt Bouddhiste". On peut pratiquer plusieurs croyances sans que cela ne heurte personne.
Dès le début, définir le Shinto est malaisé, car le terme de "religion" ne lui sied pas vraiment, tout comme pour le bouddhisme. Il s'agit plutôt d'une manière de vivre, une manière de ressentir son environnement, qui n'est pas vraiment comparable à la "religion" tel qu'on la conçoit en Europe. Mais je vais être obligée d'utiliser ce terme, même si c'est avec des pincettes.
Le shinto donc, religion sur lequel sur base Kamichu, est animiste. C'est une religion qui considère qu'il existe un esprit en chaque chose, chaque brin d'herbe, animal, événement... Mais pas seulement parmi les choses dites "nobles". Il existe aussi des Kami sans prestence rattachées aux plus petites choses de la vie comme les excréments ou les crachats. L'ensemble des kami est nommé Shinkoku (神国 « le pays des divinités »). Il existe en fait autant de Kamis qu'il existe de choses sur terre. C'est une pratique qui possède de nombreuses fêtes (ou matsuri) qui permettent aux gens de se retrouver dans les sanctuaires: fête de l'An neuf, fête des poupées, fête des garçons, fête des enfants, rendant le monde terrestre aussi important que le monde céleste. Cette égale importance du sacré et du quotidien est en quelques sorte le fer de lance du shintoïsme, tout comme l’importance de l’appartenance à une communauté, le shintoïsme étant au final plus un ensemble de pratiques qu’une doctrine précise. [Plus d'infos ici.]
On pourra considérer les yokai comme faisant partie d'une culture beaucoup plus populaire, orale, et n'appartenant à aucune religion contrairement aux kamis. Un yokai est défini comme étant "un être vivant, forme d'existence ou phénomène auxquels on peut appliquer les qualificatifs extraordinaire, mystérieux, bizarre, étrange et sinistre" ou encore "être supernaturel qui n'est ni un kami, ni un fantôme" . Dans le langage courant, yōkai est l'équivalent du mot "monstre" des langues européennes (D'ou la dénomination "yokai" des monstres dans le manga saiyuki de Minekura Kazuya alors que ces monstres ne sont pas des créatures "yokai" au sens folklorique du terme. )
Suite à la brusque modernisation du Japon à partir de la deuxième moitié du XIXème siècle, la croyance aux yōkai se perdit peu à peu et ceux-ci ne furent plus considérés que comme des superstitions folkloriques désuettes.
C'est le mangaka Shigeru Mizuki qui a contribué dans les années 60 à relancer l'intérêt du grand public pour ces créatures, notamment par le biais de son manga Kitaro le repoussant, et c'est en grande partie grâce à lui s'ils ont retrouvés leur place dans l'imaginaire collectif et de ce biais dans les livres et les mangas.
Le yokai est donc en quelque sorte le pendant "monstre" du kami qui lui est une divinité. Subjectivement, je considère les Kami comme "vivants et lumineux" alors que les yokai sont plutôt des créatures de la nuit et de l'obscurité. Mais les kami ne sont pas forcement bienveillant, et les yokai pas forcement maléfiques. La frontière entre eux deux reste donc assez fine.
Revenons en à l'animé :
Le premier épisode de Kamichu nous présente donc Yurie, collégienne qui déclare à sa meilleure amie être "devenue une déesse". Pas d'explications sur cette soudaine transformation, qui semble être prise très au sérieux par Matsuri, qui vit elle même dans un sanctuaire. Elle va donc décider d'aider Yurie à révéler son pouvoir, à l'aide de chorégraphies et cris savamment lancés à l'efficacité plus que discutable. Elles vont ensuite au temple, ou elles cherchent à révéler les pouvoirs de Yurie à l'aide d'une cérémonie religieuse dans le temple, aidée en cela par la petite soeur de Matsuri qui elle, possède réellement des pouvoirs, contrairement à sa grande soeur.
A ce point précis de l'animé, j'en venait à me demander si Yurie avait vraiment des pouvoirs. Mais oui, elle en a : Ses tentatives pour utiliser ses pouvoirs ont finis par faire naitre un cyclone qui se rapproche de leur ville, qu'elle finira par arrêter. L'épisode est distillé dans une légère romance présentant les sentiments de l'héroine pour Kenji, un jeune homme à la distraction telle qui ne parvient jamais à se souvenir du nom des gens.
Je suis sortie du visionnage de ce 1er épisode très mitigée. Pourquoi personne ne semblait s'étonner que Yurie soit devenue une déesse ? Pourquoi cette donnée était-elle prise avec tant de légèreté ? L'environnement des héroïnes n'a rien de magique, mais pourtant elles agissaient comme tel.
Je ne sais plus trop par quel biais, mais j'ai finalement réalisé que je ne regardais pas cet animé avec le bon état d'esprit. Le japon dispose d'une culture populaire très forte, baignant dans le shintoisme. Les kamis sont réellement présents pour ceux qui baignent dans cette ambiance, et ce même sans se manifester de manière particulière, ou sans réaliser de chose spécifique. C'est une sorte d'attitude, de respect envers l'environnement et toute chose qui existe. Les kamis sont réels et n'ont pas besoin d'être fantastiques pour cela. Raison pour laquelle le fait que Yurie soit elle même un "Kami" est accepté si facilement par son entourage. Un Kami n'est pas forcement vénéré ou adulé.
C'est dans cet état d'esprit que j'ai abordé le second épisode, essayant de rester en mode "shinto". Difficulté culturelle s'il en est au final, je n'ai rien d'une japonaise qui aurait baigné dans ces croyances depuis sa naissance *rire* et s'il y a bien quelque chose de typiquement japonais, c'est bien ce genre de religion qui tiens au final plus de l'art de vivre.
Je ne sais pas si c'est suite à mon changement d'état d'esprit ou pour une autre raison, mais ce 2eme épisode m'a alors ravie sur tous les plans. Dans cet épisode, on apprend que Yashima-sama, le Kami du temple des Matsuri et sa soeur, à quitté le temple depuis quelques temps déjà. Yurie va donc partir à sa recherche, nous offrant les 1ers panels d'une ville envahit par les Kami. Ou les yokais ? Il en ont en tous cas l'aspect grotesque et le tempérament farceur. Ils étaient invisibles jusque lors, mais depuis l'obtention de ses pouvoirs, elle peut désormais les voir. Yurie va pousser la recherche de Yashima sama jusque dans un lieu situé "ailleurs", repère des Kami, lieu qui évoque furieusement le Shinkoku. Elle finira par retrouver Yashima-Sama, découvrant par la même la raison de sa désertion du temple, qui est de plus amusante et dans le ton de la série.
La série poursuivra par la suite sur ce ton, mêlant vie quotidienne et son inévitable romance qui, heureusement, n'empiète pas trop sur l'histoire principale, et sur cette ambiance de "fantastique quotidien" qu'est la vie de ceux qui savent voir et croire aux Kami. Elle ne se prend pas au sérieux, pas plus que ses protagonistes qui savent rester humble. Mitsué se fait régulièrement posséder par Yashima Sama lorsque celui-ci veut communiquer avec Matsuri, Yurie est une "déesse" débutante qui fait sans cesse des efforts et écrit ses fuda de son écriture maladroite, Matsuri monte son "commerce" autour de la divinité de Yurie en lui faisant réaliser des séances de prédictions au sein de la classe lors des pauses...Et elles restent avant tout des collégiennes. La romance mentionnée plus haut avec Kenji est certes présente, mais reste une toile de fond de fond assez amusante à suivre vu le caractère dudit jeune homme qui est distrait et à bien du mal à ne serait-ce que se souvenir de l'héroïne. Il m'agaçait lors de ses premières apparition, mais à force j'ai appris à l'apprécier et le trouver agréable. Par contre, les gêne excessive de l'héroïne à son égard à le don de m'agacer.
Chaque virée dans le Shinkoku m'a enchanté, et j'aurait voulu que cela dure plus longtemps. Sur ce point, petite déception personnelle : L'univers shinto est très présent, mais les Kami sont la en toile de fond et pas forcement au 1er plan. Il y a par exemple un épisode complet basé sur les élections du conseil de classe, qui ne fait quasiment pas intervenir les Kamis. Par pur goût personnel, j'aurait voulu toujours plus de Kami et de virées dans le Shinkoku.
Globalement, j'ai un ressenti mitigé des personnages. Les amies de Yurie, Matsuri et Mitsué, sont un peu trop uniforme à mon goût : Matsuri est fonceuse et profiteuse, Mitsué calme et pondérée. On peine à voir plus de ces personnages secondaires qu'une façade uniforme. En contrepartie, j'ai eut un bon ressenti de Miko, la petite soeur de Matsuri, ainsi que de Ken, qui présentait aux finals plusieurs aspects de sa personnalité et ne se résumait pas à un adjectif. Les parents de Yure également, ne sont pas simplement des PNJ d'arrière plan mais de véritables personnages avec leurs humeurs et leurs envie, et leurs interventions m'ont toujours plus, tout comme de les voir agir l'un envers l'autre (Ils sont un couple adulte et mariés mais se comportement parfois comme de jeunes amoureux. )
Ce qui prédomine dans Kamichu, c'est la notion de respect. Respect envers les ancêtres, envers les personnes âgées, envers les Kamis et donc envers tout ce qui nous entoure et a une âme. L'ensemble de la série, de manière plus ou moins directe, est une ode au respect et aux traditions, évoquant de ce fait les productions ghibli comme par exemple Totoro ou toute autre histoire liée à la nature et l'esprit d'un village traditionnel. Mais ce respect général n'est pas dirigé seulement vers la "mère nature" avec un facile message écologique. C'est plutôt un respect porté vers la communauté, l'amour pour la ville ou l'on a grandit, et toujours fortement imprégné de shinto, avec le sens du sacré dans la nature, le respect des ancêtres, le sens de la famille, le goût des fêtes et des cultes locaux, etc. Une sorte de positivisme est mêlée à ce culte de l'ancien, cherchant à privilégier le souvenir des bonnes parties ou de ce qu'un événement à apporté de bon, plutôt que de ressasser les erreurs du passé.
D'un point de vue technique et subjectif, j'ai trouvé l'animé très soignée. Le moindre des mouvements des personnages est réfléchi, et la maladresse de Yurie est parfaitement rendue sans être exagérée. Il est fréquent qu'elle ait ses expressions que j'appellerais "tête de mochi" à la bouille toute ronde et déformée, au rendu des plus amusant et mignon. Quand elle rougit, c'est plus fréquemment des taches roses sur ses épaules qu'un halo de rougissement, et ça aussi c'est choupi trognon.
Quand aux musiques, elles forment une petite équipe bien soudée et homogène que l'on ne se lasse pas d'entendre, avec des thèmes récurrents à certains situations, comme celle pour le monde des Kami, etc. Globalement sur un thème léger ou un peu mélancolique, et parfois particulièrement folklorique évoquant les fêtes traditionnelles pour d'autres.
Dans son ensemble, Kamichu est une série très mignonne et légère, un animé doux aux couleurs pastels et à la musique apaisante. C'est également une série aux accents nostalgiques assez présents : L'environnement traditionnel et donc ancien, le fait que tout soit relié aux kamis et donc souvent à des choses passées ou instaurées depuis longtemps... Les regrets sont parfois présents, mais jamais trop amers.
(La version papier est sortie en avril 2010 aux éditions Ki-oon et comporte 2 volumes. Les avis divergent à son sujet, pour ma part, j'hésite à l'acheter : Relire exactement la même histoire que j'ai put suivre dans l'animé ne m'intéresse pas vraiment, d'autant plus que c'est une adaptation postérieure à l'animée, le résultât risque donc d'être en deçà de l'animé. )
Par contre, ayant été – comme certainement beaucoup de monde – stoppée à l’épisode 13 suite à l’arrêt de la team Akatsuki, je songe à me procurer les Dvd. Reste à voir si une potentielle distribution française est à espérer ou pas. Peut-être en fonction du succès du manga ?